Pour que notre pays soit dynamique et prospère, il faut que nos hôpitaux le soient. On n’insistera jamais assez sur l’importance de ces établissements pour notre bien-être économique et social, ni sur l’ampleur des défis auxquels ils seront confrontés au cours de la prochaine décennie. L’évolution démographique et l’innovation technologique contribueront de façon déterminante à façonner le monde de demain.
Les hôpitaux seront en première ligne des services à une population vieillissante, ce qui exercera une pression accrue sur le système de soins de santé et les ressources. Dans dix ans, les gens de 65 ans et plus constitueront environ le quart de la population du Canada, faisant de notre pays l’une des « sociétés super-âgées » de la planète.
Étant donné les soins nécessaires aux personnes âgées, la demande de travailleurs sera bientôt plus forte dans le secteur de la santé que dans l’ensemble de l’économie. Cependant, en raison de la même évolution démographique, il y aura aussi moins de gens pour travailler dans ce secteur. Même selon le scénario le plus optimiste, le réseau de la santé devra encore trouver près de 20 000 travailleurs de plus que le bassin disponible. Voilà l’écart qu’il faudra combler.
Mais le défi dans son ensemble est plus profond. Les institutions doivent aussi s’adapter à un contexte exigeant un nouvel ensemble d’aptitudes liées à l’innovation technologique qui transforme actuellement le mode d’administration des traitements et des soins de santé. Par exemple, on aura besoin de scientifiques des données pour sonder les bases de données toujours plus volumineuses des hôpitaux afin d’en dégager des enseignements qui permettront d’améliorer les soins. On aura aussi besoin de technologues de l’impression 3D pour créer des modèles anatomiques aux fins de préparation aux chirurgies.
Il est permis d’être optimiste. Selon un nouveau rapport de RBC, l’effet de l’automatisation sur l’emploi en milieu hospitalier sera faible. Bien sûr, certains rôles seront automatisés dans des domaines où les procédés peuvent être simplifiés. On songe par exemple aux fonctions administratives ou aux laboratoires de diagnostic.
Cependant, vu la nature essentiellement humaine du travail dans les soins de santé, ce n’est pas de sitôt que l’automatisation y sera une menace pour la majorité des emplois. En fait, selon nous, l’automatisation permettra plutôt aux professionnels de la santé de se concentrer davantage sur la dimension humaine du travail. C’est là un aspect de première importance, particulièrement dans le cas des soins aux patients âgés, qui ont souvent besoin d’aide pour obtenir des services auprès des diverses composantes du réseau de la santé.
Des initiatives à cet égard sont déjà en cours. Ainsi, dans le monde de l’éducation, on intègre des compétences générales aux programmes d’études. Par exemple, la faculté de médecine de l’Université de Toronto se désintéresse peu à peu de la moyenne pondérée cumulative pour se concentrer plutôt sur les aptitudes sociales et interpersonnelles des candidats. De même, le Conseil médical du Canada s’emploie à repenser sa façon d’évaluer les médecins en formation en mettant davantage l’accent sur l’aptitude à la résolution de problèmes dans de nouvelles situations.
On pense que de nouvelles sources de main-d’œuvre pourront combler une part importante des 370 000 nouveaux emplois qui, selon les estimations d’Emploi et Développement social Canada, seront créés dans le réseau de la santé d’ici 2025. Selon nos recherches, un million de Canadiens occupant un emploi fortement menacé par l’automatisation possèdent un certain nombre d’aptitudes clés — écoute active, souci du service à la clientèle, intelligence sociale et capacité de monitorage — qui seront recherchées dans le réseau de la santé.
Prenons un exemple. Même si la popularité croissante des véhicules autonomes et la livraison par drone feront chuter l’emploi dans les services de livraison, certains des travailleurs délogés pourraient devenir ambulanciers paramédicaux, avec comme tâche de prodiguer des soins d’urgence et de transporter les personnes malades ou blessées vers les hôpitaux.
L’un des plus grands défis de notre époque sera de faciliter ce type de transition pour les travailleurs. À cette fin, il faudra que les gouvernements et les organisations professionnelles relèvent eux aussi un défi en adoptant une perspective non limitée aux cheminements de carrière et aux modèles de rémunération traditionnels. C’est en créant ainsi des ponts vers notre secteur qu’on pourra y attirer le type de personnes dont nous aurons besoin dans la décennie qui s’amorce. Surtout, une telle approche contribuera à trouver un remède aux problèmes liés à l’évolution démographique et à l’innovation.
Notre rapport propose une voie d’avenir. La mise en œuvre d’une stratégie nationale de développement des aptitudes pour le réseau de la santé, dirigée par les provinces, serait une mesure utile. De même, il serait bon de créer un tableau de bord d’information indiquant où se trouvent les pénuries de main-d’œuvre dans le réseau canadien de la santé. Il s’agirait d’une source de données clés pour les décideurs politiques.
Il est important de créer et d’élargir des programmes de réorientation de carrière ayant pour objet d’attirer des professionnels dans le réseau de la santé, en s’assurant de limiter au minimum le nombre d’années de formation additionnelle requises. Enfin, il y aurait lieu de créer dans le secteur de la santé plus d’occasions d’apprentissage intégré au travail à l’intention des travailleurs d’autres domaines, tant pour injecter de nouvelles idées dans ce secteur que pour en favoriser l’accès.
Notre réseau de la santé peut compter sur des dirigeants faisant preuve de courage, de convictions et de compassion. Ces qualités seront essentielles pour repenser et réinventer les façons de maintenir et d’améliorer ce réseau, et ainsi favoriser la prospérité du Canada de demain.
Lire le rapport intégral sur notre site Leadership avisé.
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