Aller au contenu principal
RBC
Après avoir souffert des restrictions liées à la pandémie, des pénuries de main-d'œuvre, des problèmes d'approvisionnement et de stress, la pression s'intensifie. La Dre Robyne Hanley-Dafoe, experte en résilience et en bien-être, donne des conseils pour aider à retrouver équilibre et énergie.

Selon un rapport publié en 2022 par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) et Nexium Canada, les deux tiers des propriétaires de petites entreprises ont déclaré s’être sentis proches de l’épuisement professionnel plus tôt cette année, et 50 % ont affirmé être aux prises avec des problèmes de santé mentale.

Conférencière et érudite, Dre Robyne Hanley-Dafoe est une formatrice en psychologie et en éducation plusieurs fois primée. Spécialisée dans la résilience, la gestion du stress et du changement, le bien-être personnel en milieu de travail, elle en est venue aux mêmes conclusions. Lors d’une récente conversation, elle a constaté que les propriétaires d’entreprise subissent énormément de stress et sont épuisés, ce qui peut avoir des répercussions sur leur bien-être et leur rendement.

Les propriétaires ont tendance à négliger leur propre bien-être.

« Ces dernières années, j’ai remarqué que les propriétaires d’entreprise ont une propension continue à faire passer les besoins de leur personnel et de leurs équipes avant leur propre santé émotionnelle et mentale », explique la Dre Hanley-Dafoe. Même si ces tendances existaient bel et bien auparavant, elles se sont accentuées pendant la difficile période de pandémie. Aujourd’hui, alors que les propriétaires demeurent préoccupés par leurs employés, la Dre Hanley-Dafoe voit ce comportement refaire surface. « Cela devient une charge très difficile à porter seul. Les propriétaires doivent soutenir leur entreprise et s’occuper de leurs employés alors qu’ils sont eux-mêmes fatigués, ce qui accroît le risque d’épuisement professionnel. »

Le problème vient en partie du fait que les propriétaires d’entreprise ont cette culture entrepreneuriale qui consiste à faire passer les besoins des employés avant les leurs. « C’est ce que l’on attend d’eux », déclare la Dre Hanley-Dafoe. « Les propriétaires estiment que ce sacrifice est nécessaire pour être un bon dirigeant et un bon chef d’entreprise. » Elle admet aussi le fait que si les propriétaires n’assument pas le travail, la pression et les responsabilités, personne d’autre ne le fera. « La pression est énorme lorsque vous tablez sur vous-même, vos compétences, vos talents et vos qualités. Personne ne s’y intéressera autant que vous, parce que vous êtes pleinement investi ; vous n’avez pas la possibilité de prendre un jour de congé ou de prendre du recul. »

Que se passe-t-il lorsqu’on oublie de prendre soin de soi

Malheureusement, privilégier continuellement les besoins des autres – et les besoins de l’entreprise – au détriment des siens comporte son lot de conséquences négatives. « Le plus important à retenir, c’est que votre bien-être en pâtira. Votre santé physique, votre santé émotionnelle et même vos relations commenceront à en souffrir », explique la Dre Hanley-Dafoe. « Votre qualité de vie est profondément et négativement compromise lorsque vous ne prenez pas le temps de récupérer, de vous ressourcer et de vous reposer. »

Ceci n’est pas une nouvelle pour bien des chefs d’entreprise qui comprennent l’importance de prendre soin d’eux-mêmes. « Mais il y a souvent un écart entre ce que nous savons et ce que nous faisons », explique la Dre Hanley-Dafoe, qui a étudié le phénomène selon lequel savoir mieux ne veut pas nécessairement dire faire mieux. « Les gens sont très conscients de ce qu’il faut pour se sentir en bonne santé, mais il y a une déconnexion. »

Pour aider les chefs d’entreprise à faire le lien entre le savoir et l’action, elle souligne notamment les répercussions sur le rendement lorsqu’ils courent le risque de s’épuiser. « Nous constatons que les erreurs se multiplient lorsque vous faites des choses en heures supplémentaires. Il existe un lien entre la productivité et la récupération. En fait, il faut comprendre que la récupération est intrinsèquement liée au rendement élevé et à la capacité à bien faire son travail. »

Trois signes avant-coureurs de l’épuisement professionnel

La Dre Hanley-Dafoe encourage les propriétaires d’entreprise à surveiller trois marqueurs avant que leur santé et leur rendement ne soient menacés.

  1. L’épuisement profond « Si vous vous couchez tôt et vous réveillez encore fatigué, et si vous n’arrivez pas à garder votre énergie, c’est un signe que votre organisme est surmené », dit-elle. Par conséquent, les tâches peuvent être plus longues à exécuter et la motivation peut considérablement s’effriter.
  2. Le cynisme « Si vous remarquez que vous êtes susceptible, facilement irritable et que vous avez l’impression que personne ne peut faire le travail aussi bien que vous, c’est un signe que vous vous acheminez vers l’épuisement professionnel.
  3. Commettre des erreurs « Le fait de rater des tâches, de commettre des erreurs et d’oublier des choses plus qu’à l’habitude est un bon indice que vous devez prendre une minute pour vous ressourcer », dit-elle.

Conseils aux propriétaires d’entreprise : trouver un équilibre pour lutter contre l’épuisement professionnel

Après plus de 17 ans d’enseignement et de recherche, la Dre Hanley-Dafoe jouit d’une expérience considérable dans l’accompagnement des propriétaires et des dirigeants d’entreprise dans leur démarche de résilience et de bien-être au travail. Elle donne des conseils pratiques et perspicaces pour les aider à retrouver un équilibre et à éviter l’épuisement professionnel (ou à s’en rétablir).

Accepter la vulnérabilité

« La force qui caractérise un leader est sa capacité à accepter la vulnérabilité », déclare la Dre Hanley-Dafoe. « Porter un masque ou une armure requiert beaucoup d’énergie cognitive et nous nous épuisons plus rapidement qu’il ne le faut lorsque nous essayons toujours de faire bonne figure », explique-t-elle.

Elle ajoute qu’il est essentiel de savoir quand et avec qui partager. « Il y a un temps pour dévoiler nos vulnérabilités et nous devons le faire avec précaution. Mais nous devons absolument le faire, car c’est important pour notre capacité de rendement. »

Aller vers les autres

Avoir de vraies conversations et se sentir vu, entendu et validé par les autres procurent un sentiment de soulagement et donnent l’impression de ne pas être seul. Cela est particulièrement vrai lorsque vous travaillez à distance : la camaraderie est importante. « Quel que soit l’endroit où vous vous trouvez en termes d’espace physique, assurez-vous de prendre le temps de nouer des relations et des liens », encourage la Dre Hanley-Dafoe. « Parce qu’en fin de compte, toute entreprise est une entreprise humaine où les relations comptent. »

Adopter des stratégies d’autogestion de la santé

Toutefois, elle reconnaît le besoin de solitude et l’importance de disposer de quelques minutes pour rassembler ses pensées. « Ces minutes de réflexion sont si importantes », dit-elle, en ajoutant que le fait de ne plus voyager pour se rendre au travail a supprimé ce temps de transition pour beaucoup de gens. « Les chefs d’entreprise qui travaillent et vivent dans le même espace manquent de moments de solitude sur lesquels ils pouvaient compter auparavant. » Et ceux qui travaillent dans des bureaux doivent se donner la permission de faire des pauses tout au long de la journée, surtout lorsqu’ils viennent de réintégrer le travail sur place. Tout changement de routine nécessite une période d’adaptation. Soyez patient avec vous-même lorsque vous vous réhabituez à de nouvelles routines. Une autre idée essentielle est de prévoir des blocs ou du temps libre dans votre agenda pour prendre soin de vous et de respecter ce temps avec vous-même, comme vous le feriez avec votre client le plus important !

Découvrir la force de la nature « Le simple fait d’aller dehors est un moyen extraordinaire de recalibrer un système nerveux fatigué », affirme la Dre Hanley-Dafoe. Elle dit souvent aux dirigeants et aux propriétaires d’entreprise que lorsqu’ils n’ont pas l’impression d’avoir le temps de sortir faire une promenade, c’est en fait le moment où ils en ont le plus besoin.

Utiliser la musique pour donner le ton « La musique peut vous donner de l’énergie et vous aider à vous détendre. Elle peut mettre de l’ambiance et vous rééquilibrer lorsque vous vous sentez fatigué ou débordé ».

Rétablissez des routines saines, par exemple en priorisant le sommeil, l’alimentation et l’exercice, et évitez les comportements d’autosabotage.

Apprécier les points positifs

La Dre Hanley-Dafoe encourage tous les propriétaires d’entreprise à exprimer leur gratitude et à prendre le temps de réfléchir à ce qui va bien et à ce qui fonctionne. « Le fait d’être toujours centré sur les problèmes crée un sentiment de rareté. On a l’impression qu’il n’y a jamais assez de temps pour tout faire, qu’il y a simplement trop de problèmes. » Lorsqu’on se recentre de manière à prendre conscience de ce qui va bien et du chemin parcouru, nous nous sentons mieux.

Conclusion

Les propriétaires d’entreprise sont, par nature, travailleurs, ambitieux et prêts à repousser leurs limites pour prendre soin de leur entreprise et de leurs employés. Prendre le temps de s’occuper de soi est pourtant essentiel, non seulement pour la santé physique et mentale, mais aussi pour la capacité à fournir des rendements élevés, à entretenir des relations essentielles et à gérer une entreprise productive.

La Dre Hanley-Dafoe ajoute : « Prioriser l’autosoin nous donne un meilleur retour sur nos investissements que le fait de fonctionner à vide. »

Les Services de crises du Canada offrent un répertoire des lignes téléphoniques et textuelles de soutien local qui sont accessibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.