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Les étudiants en médecine doivent composer avec beaucoup de stress et de longues heures de travail. Voici quelques conseils d'une étudiante en médecine, qui est aussi promotrice de la santé mentale, sur les aptitudes à développer pour prendre en main sa santé mentale et pour favoriser celle des autres.

Aujourd’hui âgée de 25 ans, Teresa Chen étudie en médecine à l’Université de l’Alberta, à Edmonton. Pendant ses années d’école intermédiaire, une amie proche a rompu leur relation de façon arbitraire, ce qui a provoqué chez Teresa un grand choc qui a perduré pendant des années. Comme elle a grandi dans un milieu où l’on ne discute pas de santé mentale, Teresa n’a pas cherché d’aide.

Elle croit aujourd’hui qu’elle a inutilement souffert longtemps et intensément en raison de son manque de connaissances sur la santé mentale, et de l’absence de soutien de ses proches. « J’avais l’impression que mon problème n’était pas assez grave pour que je demande de l’aide. Les problèmes des autres me semblaient plus importants, et je croyais devoir m’en sortir seule. » Teresa a souffert durant de nombreuses années avant de se décider à chercher de l’aide ; elle était alors au premier cycle de ses études universitaires. Elle continue aujourd’hui de consulter un thérapeute, simplement pour s’assurer de prévenir les problèmes qui pourraient lui causer du stress.

Des jeunes parlent de santé mentale à d’autres jeunes

Pour défendre la cause de la santé mentale, Teresa a décidé de devenir membre de Jack.org, un organisme national sans but lucratif qui s’intéresse à la santé mentale des jeunes. L’organisme est soutenu par le programme Objectif avenir RBC. Devenue conférencière Jack, Teresa s’appuie sur son histoire personnelle et sur sa formation en santé mentale pour inciter d’autres jeunes à prendre soin d’eux-mêmes et de leurs pairs. « Les membres de Jack.org cherchent à révolutionner l’approche en santé mentale. L’une des choses qui nous distinguent, c’est notre modèle d’apprentissage entre pairs. Nous mettons beaucoup l’accent sur le développement des aptitudes et des habiletés nécessaires à la prise en charge personnelle de la santé mentale. Nous enseignons et soutenons la promotion de la santé mentale », explique Teresa.

Comment prendre soin de sa santé mentale

Des études ont révélé que les étudiants canadiens en médecine sont soumis à une forte pression en raison de longues semaines d’internat et de facteurs de stress importants. Comparativement aux autres diplômés d’études postsecondaires, les étudiants en médecine présentent des taux significativement plus élevés de détresse psychologique, de pensées suicidaires, de troubles de l’humeur et d’anxiété.

Voici quelques conseils de Teresa pour prendre en main votre santé mentale :

  • Reconnaissez que tout problème, si anodin soit-il, mérite qu’on demande de l’aide. « J’ai entendu des gens dire “Il me semble que je n’ai aucune raison d’être déprimé ». La situation est d’autant plus inquiétante, ne trouvez-vous pas ? Même si vous ne voyez aucune raison précise à l’origine de votre malaise, votre état en soi mérite une attention. J’aimerais avoir compris plus tôt que je méritais autant de soutien que les autres. Il aurait été utile de consulter quelqu’un, car mon malaise avait une grande incidence sur ma vie. »
  • Cherchez de façon proactive des ressources en santé mentale. « Nous avons tendance à traiter la santé mentale de façon réactive ; nous attendons qu’une crise se déclare avant d’intervenir. Pourtant, le meilleur scénario, c’est que le problème ne se présente pas du tout. » Renseignez-vous sur les ressources disponibles dans votre région. Ne pensez pas seulement aux ressources professionnelles, mais aussi aux membres de votre entourage qui peuvent vous soutenir. À qui pouvez-vous parler en toute confiance de vos problèmes ? L’organisme Jack.org peut être un bon point de départ.
  • Même à titre de professionnel de la santé, vous ne pouvez pas tout connaître. De nombreux médecins craignent de paraître faibles s’ils sollicitent de l’aide en santé mentale. « Beaucoup de nos problèmes sont très complexes, et il y a une limite à ce qu’on peut régler tout seul. Si les professionnels de la santé travaillent en équipe, c’est parce qu’en travaillant à plusieurs sur le même problème, on a plus de chances de trouver la meilleure solution. Au lieu de craindre qu’on vous juge négativement, choisissez le moment et le lieu propices pour vous confier, plutôt que de cacher votre malaise. »
  • Il peut être nécessaire de faire quelques essais avant de trouver la ressource qui vous convient. Il n’y a pas nécessairement compatibilité entre vous et les gens dont vous sollicitez le soutien. Ne soyez pas craintif ou mal à l’aise de regarder ailleurs pour trouver la bonne personne. Teresa confie qu’il lui a fallu trois essais pour trouver une ressource avec qui elle se sentait à l’aise.
  • Réservez du temps juste pour vous. Au Canada, la médecine diffère des autres disciplines universitaires en ce qu’elle ne comporte pratiquement pas de temps d’arrêt. On passe sans cesse d’un stage à un autre. Il est alors naturel d’ignorer ses problèmes de santé mentale « jusqu’à ce que les choses se calment un peu » ; sauf que les choses ne se calment jamais. Il faut donc aménager des temps de pause dans votre vie. Vous devez réserver des moments pour consulter, pour vous détendre, pour fréquenter des gens et pour exprimer votre créativité, car personne d’autre que vous ne vous accordera ce temps.

Comment soutenir les autres

En plus d’inciter les jeunes à prendre en main leur propre santé mentale, Jack.org les encourage à se soutenir les uns les autres. Voici ce que vous conseille Teresa pour devenir un allié de vos pairs et de vos proches :

Premièrement, soyez attentif à la détresse d’autrui, en particulier en situation de stress (jour de match, session d’examen, stage difficile, etc.). Tout le monde ne réagira pas aux mêmes facteurs de stress ; gardez donc l’œil ouvert pour déceler une détresse éventuelle. Sachez comment se comportent normalement les gens. Si quelqu’un vous paraît dans un état anormal – ne se présente pas à un examen, se comporte bizarrement, se tient en retrait, s’énerve –, intervenez.

Pour soutenir quelqu’un dans le besoin, appuyez-vous sur les cinq règles suivantes :

  1. Dites ce que vous observez. Tenez-vous-en aux faits ; ne sautez pas aux conclusions, et abstenez-vous de porter un jugement. Un énoncé comme « Dis donc, j’ai remarqué que tu ne venais plus aux cours dernièrement » va droit au but tout en ouvrant la voie à la discussion.
  2. Montrez que vous vous souciez. Adoptez un ton positif afin d’inciter la personne à se confier sur sa situation. Manifestez votre compassion et offrez votre soutien en disant quelque chose comme « ça va s’arranger ».
  3. Écoutez jusqu’au bout. Apprenez à écouter sans juger, sans être indiscret et sans prétendre connaître toutes les réponses. « Assurez-vous d’écouter la personne jusqu’au bout afin de comprendre sa situation, de son point de vue et non seulement du vôtre », explique Teresa.
  4. Connaissez votre rôle. Vous pouvez être un ami, un allié, un soutien, mais sachez que vous ne pouvez pas « guérir » la personne. Vous n’êtes ni son thérapeute ni son médecin. « Tracez vos limites afin de pouvoir soutenir la personne de votre mieux tout en protégeant votre vie personnelle. »
  5. Orientez la personne vers de l’aide. Aidez la personne à trouver des ressources professionnelles et communautaires, et des amis sur qui elle peut compter pour les choses pratiques.

Normalisez la conversation

« Notre formation et notre travail sont très exigeants, et les responsabilités qui s’ajoutent en cours de carrière sont très accaparantes. Tout ce que vous faites pour développer vos aptitudes, vos habitudes et votre mode de vie de sorte à protéger votre santé mentale contribuera à votre succès ultérieur. Tout le reste de votre vie, cette préparation favorisera votre bien-être personnel et professionnel.

Si vous voulez vraiment éliminer la gêne associée aux problèmes de santé mentale, racontez votre propre expérience, si vous le pouvez. Ce faisant, vous ferez comprendre aux autres qu’ils ne sont pas seuls. Cela contribuera à normaliser la conversation. »

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