La collection d’œuvres d’art peut devenir la passion d’une vie. Norbert Langlois est cofondateur du Cercle des collectionneurs d’art actuel, dont l’objectif est de promouvoir et démystifier l’acquisition d’œuvres d’art. Il est lui-même collectionneur.
« J’ai commencé à collectionner l’art à 19 ans, au cégep, dit-il. Aujourd’hui, avec ma conjointe, Marie-Christine Morin, nous avons une collection qui regroupe environ 150 œuvres. Nous en achetons plusieurs chaque année et nous avons une pièce pour les entreposer. Deux fois par an, on fait une rotation de ce qu’on accroche à nos murs. »
Pas besoin d’être riche pour devenir collectionneur. Selon Émilie Grandmont Bérubé, président du conseil d’administration de l’AGAC et directrice de la Galerie Trois Points, il est possible d’acquérir une première œuvre pour aussi peu que 150$.
« Et avec un budget entre 1000$ et 3000$, on pourra avoir une œuvre d’un artiste établi, quelque chose de qualité », ajoute-t-elle.
« Acheter de l’art n’est pas une question d’argent, dit Norbert Langlois. C’est une question de confiance. Il faut avoir confiance en l’artiste, en l’œuvre, en soi et en son propre jugement. Quand on décide d’investir 200$, 500$ ou 1500$ pour acheter une œuvre, on sait que l’on ne pourra pas utiliser cet argent pour faire autre chose. Pour faire cela, il faut avoir confiance en soi et oser franchir cette étape, en sachant que cette œuvre d’art, chaque jour, va nous rappeler cette confiance. Elle va prendre de la valeur et un dialogue va s’installer entre nous et l’œuvre, un dialogue qui ne finira jamais. »
Pour commencer une collection, il conseille de se donner un budget, de prendre son temps et de réfléchir.
« Quand on entre dans une galerie, on n’est pas obligé d’acheter le jour même, dit-il. La plupart des galeries offrent aussi la possibilité d’étaler les paiements. Les gens vont dire que 1200$ pour une œuvre d’art, c’est cher, mais quand on y pense, c’est quelque chose qu’on va conserver toute sa vie, contrairement, par exemple, à un voyage dans le Sud. »
À savoir avant d’acheter une œuvre
Les spécialistes s’accordent pour dire que le premier critère d’achat d’une œuvre est notre propre appréciation. Il faut acheter des œuvres qui nous plaisent, avec lesquelles on aimera vivre. Au-delà de ce premier coup de cœur, si l’on souhaite monter une collection de valeur, il faut prendre le temps de s’éduquer et de s’informer.
Plusieurs facteurs influencent la valeur d’une œuvre, notamment sa nature, ses dimensions et le médium utilisé. Le parcours de l’artiste est très important.
« On doit se poser une question sur la pérennité potentielle de cette œuvre, dit Norbert Langlois. Veut-on acheter une œuvre tout simplement pour décorer, ou acheter une œuvre qui peut avoir une chance de pérennité? Si l’on vise la pérennité, il faut faire des recherches sur l’artiste. Un artiste dont les œuvres font déjà partie de collections individuelles, d’entreprises ou de musées a plus de chances d’avoir une pérennité. Par exemple, acheter aujourd’hui une œuvre du collectif BGL, qui fait partie de plusieurs collections, est un excellent placement. Il faut lire le CV de l’artiste, poser des questions sur lui pour voir s’il est sérieux dans sa carrière avant de dépenser quelques milliers de dollars. »
Attention : on ne s’enrichit pas avec l’art rapidement comme on peut le faire à la bourse, et ce n’est pas le but à viser.
« Sur le plan mondial, l’art a de bons rendements, mais à moyen et à long terme. Il ne faut pas aborder une collection en visant des rendements en pourcentages, en chiffres. Il n’y a pas de règles précises permettant de prévoir le rendement, mais si on prend un artiste qui a vraiment une bonne crédibilité et qui est collectionné par des musées, je pense qu’on va avoir de meilleurs rendements qu’un REER, à long terme. Il ne faut pas voir l’art sous forme de spéculation, surtout pas au début. Il ne faut pas espérer payer une œuvre 500$ et la revendre dix fois cher plus dans cinq ans. On ne doit pas oublier que le marché de la revente, au Québec, est assez petit. Personnellement, je pense que mes œuvres, je vais les léguer à mes enfants. Je vais suggérer leur suggérer de vendre une ou deux œuvres et de conserver la collection. »
Pour ce passionné, la rentabilité d’une œuvre se situe au-delà de l’argent.
« Quand on parle de rentabilité, on pense à la rentabilité monétaire, mais ce qu’une œuvre d’art peut apporter à quelqu’un dans sa vie, comme plaisir, comme apprentissage et comme enrichissement personnel, c’est une autre forme de rentabilité. »
Comment faire ses devoirs
Pas besoin d’avoir un diplôme en histoire de l’art pour faire une collection, mais avant de se lancer dans l’achat d’une première œuvre, il faut tout de même faire ses devoirs. Il est conseillé de prendre du temps pour s’initier en lisant sur l’art et les collections, en visitant des musées, des galeries, des centres d’artistes, des foires et autres événements. Heureusement, les ressources en la matière sont abondantes.
L’Association des galeries d’art contemporain a publié Collectionner, Le Guide, un outil québécois assez complet pour démystifier la collection d’œuvres d’art. On pourra aussi en apprendre plus sur la collection avec The Intrepid Art Collector : the Beginner’s Guide to Finding, Buying and Appreciating Art on a Budget, de Lisa Hunter, et mieux comprendre l’art moderne avec Pourquoi un enfant de cinq ans n’aurait pas pu faire cela : l’art moderne expliqué, de Susie Hodge.
Une excellente façon de s’initier à l’art est de participer à des activités de médiation. Plusieurs groupes de collectionneurs, comme le Club des collectionneurs en arts visuels de Québec ou les institutions muséales offrent des activités d’initiation à l’art, des visites d’ateliers et des conférences.
À Montréal, le Musée d’art contemporain offre SéminArts, un programme éducatif d’initiation à la collection, en cinq rencontres d’une heure chacune, qui permettront de visiter une galerie, une collection de musée, une collection d’entreprise, une collection et un atelier d’artiste.
« Cela donne une vision presque complète du milieu et de ses différents intervenants », dit Émilie Grandmont Bérubé.
Les foires artistiques sont un excellent moyen pour découvrir et rencontrer des artistes québécois et dénicher, peut-être, la première pièce de sa collection. Comme il s’agit d’événements grand public de courte durée, elles peuvent aussi être moins intimidantes, pour le néophyte, qu’une galerie d’art.
Pour acheter à prix abordable une première œuvre d’un artiste contemporain, la foire Papier, qui a lieu chaque année à Montréal, est un incontournable.
« C’est une des plus grandes foires en art contemporain au Canada, dit Émilie Grandmont Bérubé. C’est aussi une occasion exceptionnelle de voir ce que présentent plusieurs galeries, en un seul lieu. Cela donne accès à beaucoup de choses et cela permet d’aiguiser notre regard et de comprendre ce qui nous fait vibrer. Le médium papier est très large, on y trouve de la peinture sur papier, du dessin, de la gravure, de la photo, de la sculpture. »
La Foire d’art contemporain de Saint-Lambert en sera en 2017 à sa 8e édition. À Québec, la Foire en art actuel de Québec, a lieu chaque année en novembre au complexe Méduse, dans les locaux de la galerie Œil de poisson.
Les galeries d’art, quant à elles, sont un monde en soi.
« Ce sont des lieux privilégiés où l’on rencontre les galeristes, des passionnés dont le métier est de nous parler de l’art, dit Émilie Grandmont Bérubé. Il faut savoir distinguer une galerie commerciale, dont le but est simplement de vendre, et une galerie sérieuse, qui fait un travail de représentation et qui bâtit des carrières d’artistes. Les galeries qui font partie de l’AGAC, par exemple, s’engagent auprès d’un artiste sur de longues périodes. Elles représentent des artistes sur l’ensemble de leur pratique, de leur travail, au lieu de choisir quelques œuvres parce qu’elles pensent qu’elles seront plus faciles à vendre. »
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