Aller au contenu principal
RBC
Nous avons tous en tête ces quartiers qui poussent à grande vitesse sur les ruines d’anciens secteurs industriels. Le temps de le dire, ces lieux où s’entassaient les ouvriers du siècle dernier se transforment en terreau d’adresses branchées. Aux étages, les manufactures d’antan s’emplissent de créatifs et d’activistes des nouvelles technologies ou de productions cinématographiques. Aux parois des immeubles, l’art mural s’expose, s’exprime.

Le Mile-Ex est dans cette mouvance: au carrefour de son évolution, entre chaos et harmonie. Des rues portant le même nom se croisent, les culs-de-sac sont légion, une voie ferrée le sillonne. Même trouver l’entrée du quartier, pourtant à une minute à l’ouest de la Petite-Italie, n’est pas si aisé.

Le Mile-Ex est une destination sans équivalence au Québec. Exploration de ce secteur aux tonalités de Brooklyn et de Berlin.

L’assiette

Le restaurant Manitoba est le premier à avoir fait rimer Mile-Ex et gastronomie. Le soir, en été, l’espace révèle ses charmes : le mur arrière s’évapore, notre regard se pose alors sur une éblouissante cour. Le plaisir des yeux se prolonge avec son menu créatif et sa carte des vins rigoureuse. C’est que le Manitoba privilégie avec grands soins ses racines locales et autochtones. On pense au bourgot, à l’aronie, au sarrasin, au pin blanc, à l’églantier, à la mélasse et au poivre des dunes ; aussi au cerf, au canard et à la morue. Ce souffle issu des forêts boréales plane sur le territoire du Manitoba, nous conviant à une éclairante randonnée aux flancs du terroir contemporain.

Crédit: Maxyme G. Delisle

Le bien nommé Mile-Ex est de fort calibre, ici en mode micro resto pour macro plaisirs. On entre et, déjà, le cœur est à la fête. Comme si on nous invitait dans l’intime espace-cuisine d’une brigade sympathique, affairée à concocter des enfilades de fruits de mer, cerclées de quelques options carnivores ou végés. D’esprit cuisine de rue, mais haut de gamme, on parle ici de saumon mariné à froid, de poêlée de calmars et de squid roll merguez. Plein la vue, plein la bouche.

Pour le lunch, on fréquente le Pick-up : à la fois dépanneur et comptoir casse-croûte. Dans ce bric-à-brac contrôlé, les officiants aux plaques chauffantes sont des ouvriers du bonheur. Le burger tout garni est le meilleur de la planète, les grilled cheese sont décadents et les sandwichs, réputés pour être parmi les préférés de la métropole (porc effiloché, haloum grillé, etc.). On y sert des déjeuners toute la journée, parfait pour ces créateurs de la nuit qui alimentent le mythe du Mile-Ex. En été, quelques tables sur le trottoir nous précipitent dans l’épicentre du Mile-Ex. Fermé le dimanche.

Crédit: Véronique Soucy

D’autres restos méritent visite. Du nombre, Le Diplomate, pour ses compositions inventives signées Aaron Langille, sa carte de vins et de bières, et ses prix amicaux. Aussi, le Dinette Triple Crown, comptoir qui nous sert une cuisine du sud des États-Unis, assumée. Le poulet frit trône en roi, flanqué de ses dignes seigneurs : le porc effiloché et le brisket fumé. On mange sur place pour l’ambiance. L’été on se déplace dans le parc voisin, en mode pique-nique. En plus des plats, l’endroit propose une impressionnante variété de bourbons, à savourer nature ou en cocktail. La déco de la dînette est aussi intime que mémorable.

Le Marconi est à explorer, tout comme le Ballpark où l’accueil est très sympathique. La déco, les lampes inversées rivées au plafond et la palette de cocktails et de plats tout bons prennent des allures de revenez-y.

Le café

Le Dispatch est tout juste voisin du Manitoba. Si les tables sont aussi rares que les sourires (le Mile-Ex, derrière certains comptoirs, c’est parfois sérieux), on y retrouve de l’excellent carburant à neurones. Pressé à froid, équitable, traçable, le café est torréfié sur place, distribué dans plusieurs points de vente, dont deux autres adresses Dispatch postées à Montréal. L’endroit, qui sert aussi des tartines, est tout désigné pour y échantillonner la faune du Mile-Ex.

Pour vous catapulter hors du temps, quelque part en 1992 (mais avec du Wi-Fi), et ce, dans un endroit aussi zen qu’un columbarium, vous aimerez le Café L’Artère, coopérative de solidarité valant tous les détours. Le Café Guerrero est aussi un bon plan. Pour emporter : soupe, sandwichs, bagels, salades, café, le tout à prix abordable.

Le bar

L’Alexandraplatz est un phare du Mile-Ex. Son allusion à la mythique place et station de métro berlinoise Alexanderplatz n’est certes pas le fruit du hasard : les vibrations y sont aussi bonnes que la bière, les tables extérieures et son design au vocabulaire industriel. L’endroit n’est ouvert que de mai à octobre. Osons nommer la réalité, c’est hipster, mais aussi bigarré. Les pintes de la Brasserie Vieux-Montréal (BVM) s’entrechoquent, les cocktails sont simples et sympas, la musique est bonne.

Crédit : Mystique Imaging

Coup de foudre du côté de la Brasserie Harricana, resto-bar-taverne au look singulier et lumineux qui propose une gamme de bières élaborées sur place et un menu très fréquentable. Le buffet du midi est étonnamment goûteux, inventif et abordable. L’endroit dispose d’un immense comptoir, destination parfaite pour y pomper du Wi-Fi tout en mettant la touche finale à son prochain scénario.

Crédit: Adrien Williams

L’art et la déco

Le centre Never Apart a été fondé en 2015 par Dax Da Silva, fondateur de la société internationale Lightspeed, qui a vu le jour dans cet espace de diffusion aujourd’hui consacré à favoriser le changement social par les arts, faisant une grande place aux créateurs et créations LGBT.

La boutique Domo Montréal se visite comme un musée alors que dans ce lieu aux évocations rétrofuturistes se côtoient des artéfacts vintage d’esprit Expo 67 et Jeux olympiques de Montréal, qui célèbrent l’iconographie de la métropole à travers une panoplie d’objets et de livres consacrés au design. Parfait pour s’accrocher un sourire au visage !

Et, mention spéciale à l’Alvéole, atelier et boutique où l’on peut se procurer du miel local, par quartier ! Ainsi, on peut repartir avec du miel non pasteurisé, fabriqué par des milliers d’abeilles qui nous permettent de comparer le goût du miel de Villeray à celui du West Island ou de Saint-Henri. Bulle dorée.

Le Mile-Ex adjacent

On triche, mais l’esprit Mile-Ex déborde parfois de ses frontières naturelles. Tout près, rue Jean-Talon, on aime le Marché Soupçon, dépanneur qui décline des soupes et des potages aux textures et aux parfums divins. Aussi pour ses sandwichs frais et variés. Plusieurs maintiennent avoir vu les meilleurs spectacles de musique à Montréal au Bar Le Ritz PDB –, pour qui apprécie l’esprit Pop Montréal et la programmation Blue Skies Turn Black.

Le nom

Pourquoi le nom Mile-Ex ? Officiellement, la ville de Montréal désigne ce quadrilatère postindustriel à l’ouest de la Petite-Italie comme étant le secteur Marconi-Alexandra, du nom de deux rues qui le traversent. Le Mile-Ex est en quelque sorte un nom d’emprunt, évoquant la jonction de deux quartiers qui le délimitent, soit le Mile-End au sud et Parc-Extension, surnommé Parc-Ex, au nord. Mile-Ex.